“La Troisième Vague”, l’expérience qui reproduit le mouvement du III°Reich dans un lycée californien
- AMC
- 21 janv. 2018
- 3 min de lecture

Lorsque les étudiantes et étudiants en psychologie – dont je fais partie - évoquent en cours les expériences sur la soumission à l'autorité, ou lorsque nous - les individus dans sa globalité - en discutons, nous pensons tous pouvoir "mieux faire" et ne pas nous laisser entraîner dans ces processus cognitifs qui pourraient nous faire agir comme des “montres”.
Mais avez-vous remarqué avec quel naturel, lorsqu'on entre en classe nous nous asseyions directement à nos tables. Lorsque nous nous adressons aux professeurs et professeures, nous les vouvoyons et les appelons "Madame" ou "Monsieur". Lorsqu'ils et elles ont fini de préparer leurs affaires et qu'ils et elles se postent devant la classe, nous nous taisons pour les laisser commencer le cours. Rappelez-vous de nos interrogations lorsqu'on nous demandait de déplacer les tables en classe, ou lorsque au lycée, un cours nous semblait décousu parce que le ou la prof le structurait en fonction de lui, plutôt que de vous faire des cours "basiques" en fonction du programme de l’Éducation Nationale. Toutes ces normes nous ont été apprises et transmises par nos institutions et notre société. Inconsciemment, nous sommes également soumis à ces figures d'autorité.
Nous connaissons les célèbres expériences de Milgram et de Standford (Phillip Zimbardo). Mais connaissez-vous celle-ci ? L'incroyable expérience du professeur Ron Jones. Une expérience appelée "La troisième vague".
L’histoire prend place alors que le lycée Cubberley en Californie démarre “la semaine thématique” lors la première semaine d’avril 1967. Son but était de prouver à ses élèves, qui restaient incrédule face à l’asservissement des allemands devant les horreurs nazis, qu’un régime autocratique pouvait revoir le jour rapidement. Il ne lui fallut que quelques jours, pour que la classe se construisit en une communauté basée sur l’esprit de groupe, rassemblé autour d’un symbole, d'un uniforme, d'un salut, des règles autoritaires exclusives et d'un leader.
Ce qu’il y a de fascinant dans cette expérience sur la soumission à l’autorité, ce n’est pas seulement la facilité avec laquelle une ‘autocratie’ a été instaurée, mais bien l’incapacité des chercheurs à établir une chronologie cohérente et ce, même en disposant des écrits des étudiants, des mémoires du professeur, des coupures de presse et du journal du lycée.

Que s’est-il passé lors de cette expérience pour que la perception temporelle en soit biaisée ? Selon Jones, le mouvement de la Vague aurait durée la première semaine d'avril, du lundi au vendredi. Selon les élèves, on retrouve cette notion de semaine mais celle-ci aurait commencé un mercredi. On retrouve également un article du journal du lycée le 7 avril 1967 qui annonce la fin de l’expérience.
Il est probable que certains étudiants aient pensé que l'expérience ait commencé un mercredi, dans le sens où durant les deux premiers jours le professeur les a conditionnés en implantant et répétant des idées, des règles et des actions servant à créer une dictature à l’échelle de leurclasse. Cela peut aussi s’expliquer par le fait que ce n’est que le mercredi que la classe ait prit conscience de leur identité de groupe en choisissant le nom de leur mouvement ainsi que leur salut, faisant lieu pour eux, du début de l’expérience.
L’expérience aurait prit fin le vendredi après qu’un parent d’élève, vétéran de la Seconde Guerre Mondiale et ancien prisonnier de guerre aurait saccagé une salle de classe, faisant comprendre au professeur que l’expérience était allée trop loin. Le journal du lycée n’évoque cependant pas cet incident. A priori le vendredi, après un discours dans lequel le professeur aurait montré aux étudiants et étudiantes des images du III° Reich et expliqué la façon dont il les avait manipulé durant la semaine pour créer un mouvement totalitaire, Ron Jones clôt l’expérience.

On retrouve également des zones de flou sur l’étendu de cette expérience. D’après les uns, elle serait restée cantonné à l’intérieur de la classe (trente étudiants); d’après les autres, ce serait tout le lycée (des centaines d’étudiants) qui aurait fini par vivre au rythme de la Troisième Vague. Des étudiants séchaient les cours pour venir assister à ceux de Ron Jones, une police secrète aurait été mise en place..
Cette expérience inspirera celle de Phillip Zimbardo « l’expérience de Stanford » et sera le point de départ des réflexions sur la malléabilité de l’esprit chez les adolescents.
Cette histoire se verra romancée à travers le prisme d’auteurs et de réalisateurs donnant lieu à de nombreux films et romans. On retient par ailleurs le documentaire “Lesson plan/L'expérience de la troisième vague” de Philip Neel qui présente l’expérience avec ces doutes sur la vérité historique; ou l’un des articles de fond rédigé par Ron Jones: “Take As Directed ” , publié en 1976 dans The CoEvolution Quarterly. Ou encore le célèbre film allemand ‘’Die Welle’’ (La Vague, en français). - AMC
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